Succession anomale : qu’est-ce que c’est, quels biens sont concernés ?

Benoît Yerle
Publié le 20 novembre 2025
| Conseiller en gestion de patrimoine
Qu'est-ce que la succession anomale ?

Cas particulier faisant exception à la dévolution successorale, la succession anomale prévoit l’attribution de certains biens à d’autres personnes que les héritiers réservataires, selon l’origine ou la nature des biens.

Qu’est-ce que la succession anomale ?

La succession anomale constitue une exception notable à la succession ordinaire. En quelques mots, elle permet d’attribuer des biens spécifiques à certains proches du défunt, plutôt qu’aux héritiers réservataires. En cela, la succession anomale déroge donc au principe d’unité de la succession.

Soulignons cependant qu’il ne s’agit pas spécifiquement d’une option à la disposition du défunt souhaitant organiser sa transmission de patrimoine de son vivant.

Plutôt, il s’agit :

  • D’un droit de retour légal ou conventionnel sur des biens donnés par des parents ou grand-parents, ou un autre donateur lorsque cela est prévu ;
  • Ou de l’attribution de certains biens en vertu de leur nature propre.

On distingue ainsi les successions anomales selon l’origine ou la nature des biens concernés.

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Droit de retour et succession anomale selon l’origine des biens

La succession anomale peut concerner certains biens transmis au défunt de son vivant, afin de les conserver dans la famille en l’absence de descendant. Elle fait alors jouer le droit de retour légal ou conventionnel.

En ce qui concerne le droit de retour légal, il faut distinguer plusieurs cas de figure, suivant à qui reviennent les biens.

Droit de retour légal des parents

Lorsque les parents, ou l’un des deux, ont réalisé une donation au bénéfice du défunt avant son décès, ils peuvent disposer d’un droit de retour légal. Notez que celui-ci ne prévaut que si le défunt n’a pas de descendance.

Concrètement, le droit de retour légal signifie que les parents récupèrent le bien qui a été donné à leur enfant de son vivant, lorsque cela est possible. Dans le cas contraire, la restitution se fait en valeur, dans la limite des possibilités offertes par la valeur de l’actif successoral.

Le droit de retour légal des parents, inscrit à l’article 738-2 du Code civil, s’exerce dans la limite de la quote part d’un quart de l’actif successoral revenant à chaque parent. Si seul l’un des parents est vivant au moment de la succession de l’enfant, sa quote-part se limite à un quart.

Dans les faits cependant, les donations effectuées par des parents au profit de leur enfant prévoient le plus souvent un droit de retour conventionnel (voir plus loin). Mais en l’absence de ce dernier, le droit de retour légal reste en vigueur, ne pouvant être supprimé par le défunt à l’aide d’un testament par exemple.

Exonération de droits de succession et restitution

Le retour du bien donné dans le patrimoine des parents se fait sans droits de succession. Les parents peuvent également demander la restitution des droits de donation payés à la première transmission, jusqu’au 31 décembre de la deuxième année suivant le décès. Et ce, même si c’est le donataire qui s’est acquitté de cette fiscalité. Enfin, en cas de nouvelle donation du bien retourné dans un délai de cinq ans, les droits acquittés lors de la première donation sont imputés sur les droits dus lors de la seconde donation.

Retour au bénéfice des frères et soeurs

Le droit de retour légal lié à la succession anomale peut bénéficier aux frères et soeurs du défunt si :

  • Le défunt n’a pas de descendant ;
  • Ses parents sont également décédés ;
  • Le bien donné par les parents existe toujours concrètement.

Ce dernier point signifie que le droit de retour ne peut s’appliquer qu’en nature : les frères et soeurs ne peuvent pas bénéficier d’un retour en valeur.

Lorsque toutes les conditions requises sont réunies, les frères et soeurs du défunt, ou leurs descendants, peuvent récupérer la moitié du bien donné par leurs parents au défunt.

Le droit de retour légal des frères et soeurs peut être contredit par le défunt, s’il le souhaite. Il peut donc en priver sa fratrie, au profit de son conjoint survivant par exemple.

Enfin, le bien récupéré par les frères et soeurs se retrouve taxable au barème des droits de succession.

Cas particulier d’un enfant adopté

Si le défunt a fait l’objet d’une adoption simple, le droit de retour légal peut s’appliquer. Il faut distinguer deux situations à ce titre.

  • Droit de retour au profit de la famille d’adoption

Lorsque l’enfant adopté décède sans descendance ni conjoint survivant, les biens donnés par les parents d’adoption leur reviennent. Alternativement, si ceux-ci sont également décédés, ils retournent à leurs descendants (frères et soeurs d’adoption).

Seuls les biens en nature sont visés par cette succession anomale.

  • Droit de retour au bénéfice de la famille biologique

Lorsque les biens ont été donnés à l’enfant décédé par ses parents biologiques, le droit de retour légal leur bénéficie.

Ce cas de figure existe uniquement dans une situation d’adoption simple, par opposition à une adoption plénière qui rompt les liens familiaux et successoraux avec les parents biologiques.

Droits de succession

Dans les deux situations, le droit de retour légal entraîne une imposition aux droits de succession.

Droit de retour conventionnel

Un acte de donation de son vivant peut stipuler expressément l’existence d’un droit de retour conventionnel, spécifique au bien ainsi transmis. De la sorte, le donateur prévoit le retour du bien en cas de prédécès du donataire, et le cas échéant de ses descendants.

Notez que ce droit de retour conventionnel bénéficie uniquement au donateur, écartant de fait tout autre bénéficiaire, héritiers compris.

Sur le plan fiscal, le droit de retour conventionnel des parents échappe aux droits de succession. Cette fiscalité s’applique cependant en cas de retour aux frères et soeurs ou aux parents adoptants et biologiques si le défunt avait fait l’objet d’une adoption simple.

Succession anomale selon la nature des biens

En dehors des biens transmis par donation du vivant du défunt, la succession anomale concerne également certains actifs précis.

L’assurance vie constitue l’exemple le plus commun illustrant ce cas de figure. Chaque contrat intègre en effet une clause bénéficiaire, dont le but consiste à indiquer à qui reviendront les fonds. Cela déroge donc à la dévolution successorale, ce qui explique pourquoi on considère l’assurance vie hors succession, en dehors d’exceptions particulières.

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Un autre exemple concerne les droits viagers :

De par leur nature, ces droits s’éteignent avec le décès du défunt. Notez qu’il est possible de prévoir la succession de l’usufruit, avec un usufruit successif (réversion d’usufruit) au profit du conjoint survivant par exemple. Légalement parlant, on considère alors qu’il s’agit de deux usufruits distincts, le second naissant du fait de l’expiration du premier.

Enfin, d’autres biens et droits peuvent figurer dans une succession anomale, à savoir :

  • Les souvenirs de famille ;
  • Les concessions funéraires ;
  • Les droits d’auteur ;
  • Les baux ruraux.
Benoît Yerle
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Benoît Yerle est conseiller en gestion de patrimoine et associé cofondateur du cabinet Fortuny.

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